À l’échelle du Canada, près de 40 % des employeurs sondés en 2018 ont déclaré avoir de la difficulté à trouver de nouveaux employés qualifiés. Cette pénurie freine la croissance et la productivité.

Trois étapes pour résoudre le casse-tête de l’écart de compétences

Le Conference Board du Canada (CBdC) étudie l’écart croissant des compétences depuis 2000. Même avant la COVID-19, le groupe de réflexion estimait que le Canada manquerait d’un million de professionnels qualifiés d’ici 2020. La plus grande province du Canada, l’Ontario, accuse un retard d’environ 190 000 postes non pourvus et on s’attend à ce que ce nombre atteigne 364 000 d’ici 2025, et 564 000 d’ici 2030. Il faut accroître l’offre de travailleurs qualifiés.

La Banque de développement du Canada est également d’avis que les pénuries de main-d’œuvre sont les plus graves en Ontario, en Colombie-Britannique et dans les provinces de l’Atlantique. À l’échelle du Canada, près de 40 % des employeurs interrogés en 2018 ont déclaré avoir des difficultés à trouver de nouveaux employés qualifiés. Cette pénurie étouffe la croissance et la productivité, car les entreprises ont du mal à trouver les bons éléments. Les principaux secteurs touchés demeurent ceux de la construction et de la fabrication.

En 2019, le gouvernement fédéral a lancé l’Allocation canadienne pour la formation, qui offre un ensemble de crédits d’impôt, de soutiens du revenu et de congés pour se perfectionner. Il a également introduit les programmes de prêts canadiens aux apprentis et de subventions aux apprentis. Par ailleurs, l’Ontario a récemment investi environ 75 millions de dollars dans trois programmes visant à exposer les élèves du secondaire à des possibilités, à savoir le Programme d’apprentissage pour les jeunes de l’Ontario, le programme de Majeure Haute Spécialisation et un programme de préapprentissage.

Est-ce suffisant? C’est un début, mais il faut faire beaucoup plus. Voici trois autres mesures nécessaires pour accroître l’offre de travailleurs de grande valeur dans le secteur de la construction et de la maintenance en attirant de nouvelles recrues.

Les professions qualifiées doivent allier les compétences numériques aux compétences pratiques

Un récent rapport du Conference Board du Canada et du Centre des Compétences Futures a conclu à la nécessité d’engager une refonte des modèles et des méthodes de formation pour mettre l’accent sur les compétences numériques et l’apprentissage tout au long de la vie. Cela englobe les aspects techniques, la gestion de l’information, la communication numérique, la collaboration virtuelle, la créativité, la pensée critique et la résolution de problèmes dans les espaces numériques. Avec les perturbations sociales et technologiques constantes que l’on observe dans les milieux de travail d’aujourd’hui, les nouveaux professionnels de la technologie de la construction et de la maintenance doivent avoir une bonne connaissance des technologies numériques, et les plus chevronnés doivent avoir accès à des possibilités d’actualisation de leurs connaissances. Si l’on veut un milieu de travail performant où le moral est élevé, on doit doter son équipe de professionnels des connaissances, des outils et de l’expérience nécessaires pour garantir la réussite dans l’économie du 21e siècle.

Un recrutement inclusif encourageant les femmes, les autochtones, les personnes privées de droits et les personnes déplacées à embrasser des carrières dans les métiers spécialisés

Nous ne pouvons pas éliminer l’écart sans attirer les femmes, les jeunes autochtones, les personnes privées de leurs droits et celles déplacées par les changements économiques structurels. Les dirigeants, les éducateurs, les entreprises et les communautés doivent s’unir pour développer des programmes de recrutement actifs et ciblés qui respectent la contribution de ces ressources, tout en offrant des environnements de travail stimulants, collaboratifs et sûrs. Ils doivent également inciter ces groupes de personnes à façonner et à changer le monde à l’aide de solutions fondées sur les compétences et souligner la sécurité que procure le fait de faire partie d’une carrière à forte demande. Il importe également qu’ils créent des environnements inclusifs où les nouveaux employés peuvent s’attaquer à des problèmes tels que le changement climatique en créant des infrastructures propres et vertes qui suscitent la fierté, tout en s’occupant des affaires et en menant une vie épanouie.

Transformer la perception de ces rôles par des discours plus convaincants

Les mots peuvent être puissants. C’est pourquoi il importe d’actualiser la terminologie et le discours du secteur des métiers spécialisés. Nous devons transformer la terminologie du 19e siècle en concepts du 21e siècle. La médecine, l’ingénierie et les technologies de l’information l’ont fait avec succès. Il est fini le temps du docteur des yeux ou du cœur. Aujourd’hui vous êtes un ophtalmologiste ou un cardiologue. Il en va de même dans le domaine des TI où vous pouvez devenir architecte de systèmes. Réinventer ces rôles peut donc contribuer à attirer du sang neuf en tenant un discours nouveau et convaincant. Peut-être qu’adopter l’angle des « nouvelles technologies » permettrait d’atteindre cet objectif. Sait-on jamais, un chaudronnier pourrait-il s’appeler un thermodynamicien des fluides, ou un soudeur, un fusionneur de métaux? Les possibilités sont infinies si on tient un discours inspirant à propos des professionnels qualifiés. Vous avez peut-être remarqué que nous n’avons jamais qualifié ces professionnels talentueux de « personnes de métier ». Il est temps de repenser les rôles et d’actualiser le langage pour que les personnes qui choisissent leur parcours professionnel s’ouvrent à des possibilités passionnantes.

Outre les mesures d’incitation publiques, le fait de réinventer la formation, d’offrir des possibilités d’intégration et de transformer le discours du secteur des professionnels des nouvelles technologies peut attirer suffisamment de recrues pour éliminer l’écart.